20 décembre 2011

Temps emprunté

Il existe des relations dont la satisfaction oscille constamment entre le pour et le contre. Tel un équilibriste, elle respire sur un fil de fer et bascule sans cesse de la colonne plus à la colonne moins. Les jours se succèdent, les points positifs restent positifs mais les bémols grandissent et font de plus en plus ombrage aux rencontres frôlant pourtant la perfection. Malgré le délice des moments partagés, une idée fraie son chemin, lentement mais très certainement.

Difficile de mettre le doigt sur ce qui nourrit cette idée. Est-ce justement la mouvance chaotique de cette histoire ou encore l’entêtement à hisser des murs rassurants qui limitent définitiment toute expansion possible ? Impossible à trancher pour l’instant. Étonnement, cette alliance surprenante aurait tout ce qu’il faut pour grandir et générer des quantités de bonheurs et de plaisirs appréciables si elle ne s’enfermait pas elle-même dans un lieu gorgé de liberté et de délices, étouffant à cause de son exiguïté.

En attendant que l’idée de la fin remplisse totalement le peu d’espace disponible et fasse suffoquer cette éphémère histoire, on profite intensément sans pouvoir toutefois s’empêcher de penser que ça a beau être du très beau temps emprunté, ça reste du temps emprunté…

8 décembre 2011

Amour cosmique

Il existe des amours transcendants, fulgurants, tellement forts qu’on ne peut s’empêcher de penser qu’ils ont déjà existés dans une autre dimension, un autre espace temps. Une rencontre subite, l’impression que le temps d’arrête, l’impression qu’on reconnait l’autre, une connexion instantanée, un désir démesuré.

Certains êtres passent une partie de leur vie à rechercher cet amour, à combler ce vide, à tenter de rassasier ce souvenir flou. Peu importe leur entourage qui tente de leur faire comprendre qu’il ne s’agit que d’un rêve, une illusion, un mirage, qui ne peut exister dans la réalité et que poursuivre cette quête ne peut qu’être dommageable pour eux.

Dans de rares cas, les astres s’aligneront suffisamment précisément pour permettre à cet amour éternel de s’ancrer au quotidien. La plupart du temps, les trajectoires se croiseront délicieusement et douloureusement, faisant naître une relation impossible et déchirante qui, malgré l’immensité des sentiments, ne pourra s’inscrire dans la durée.

Si certains rêveurs choisissent d’attendre un autre amour plus grand que nature et refusent de s’investir à nouveau, consommant ainsi une succession de corps sans jamais ouvrir leur cœur, ni partager les petits bonheurs de la vie à deux. D’autres seront soulagés de constater qu’ils n’étaient pas fous, que ce dont ils rêvaient pouvait exister et que le sentiment de vide était réel. Avec la certitude d’avoir enfin trouvé, ils pourront abandonner leurs recherches sans se trahir. Délivrés du poids de cette quête, malgré la tristesse omniprésente, ils seront en mesure de planter leurs racines dans la terre mère et de s’investir entièrement dans une relation paisible, tendre, simple, belle, remplie de plaisir et d’amour… même…

5 décembre 2011

Équilibre

La ligne qui sépare l’amoureux de l’amant est mince. L’amant de qualité je veux dire. L’amant totalement détaché, distant qui n’offre que son corps et qui consomme rapidement et froidement le nôtre m’apparait dénué d’intérêt. C’est quand les cœurs s’ouvrent, même minimalement, et que les âmes se rencontrent, que les peaux peuvent se mélanger et propulser le plaisir à l’infini.

« Mon cœur, je sais ce que je veux. Je veux un amoureux attentionné, présent au quotidien dans toutes les sphères de ma vie. Un amoureux qui se meure de passer chaque minute de libre avec moi. Un amoureux qui sait préserver son individualité malgré la proximité. Un amoureux avec qui bien sûr, la connexion physique est extraordinaire. Je ne crois pas présentement que tu puisses combler ce rôle. Je ne crois pas que tu le veuilles. Je ne pense pas le souhaiter. Mais quand ma peau se fond dans la tienne, il m’arrive d’y rêver. »

Les mystères étant ce qu’ils sont, on ne saura probablement jamais pourquoi, certaines histoires ne pourront jamais s’ancrer au quotidien, malgré la quasi perfection des moments partagés. Il ne reste alors qu’à rester immobile et à respirer profondément pour ne pas perdre l’équilibre.

3 novembre 2011

Prêt, pas prêt

Pour toi ma chérie, sans qui je ne saurais pas être qui je suis.

« C’est parce que t’es pas prête que tu es seule. Tu vas voir l’amour va te trouver quand tu seras prête »

Pfff

Comme si c’était plus facile être seule. Comme si l’amour allait au mérite. Bien sûr, plus on s’aime, plus on se connait, plus est en mesure de reconnaître et de poser nos limites, plus on a de chance de développer une relation amoureuse épanouissante. Maintenant, affirmer qu’on doit atteindre un certain stade (assez flou d’ailleurs) avant que l’univers ne daigne nous envoyer un homme digne de ce nom, est ridicule et surtout blessant. Profiter du temps que la vie nous offre en solitaire pour prendre soin de soi, grandir, devenir une meilleure personne est une excellente idée. Peu importe la proximité des gens qui nous entourent, la solitude est toujours présente. Autant s’en faire une alliée. Mais intérioriser l’idée que si on est seule c’est qu’on est ni prête, ni à la hauteur est d’une tristesse sans nom.

« Être deux, c’est régler ensemble des problèmes qu’on n’aurait pas eu tout seul » disait Coluche. Voilà qui déborde de sagesse. Partager sa route intimement demande d’être prêt à se remettre sans cesse en question, à accepter l’inconfort lié à l’intense proximité de l’autre, à laisser l’autre tenir notre main même quand on est persuadé de ne pas le mériter, à partager nos doutes et notre vulnérabilité. Et pour ça, on n’est jamais vraiment prêt. Il faut simplement un beau matin, plonger.
Suffit maintenant de relever la tête et d’ouvrir les yeux, persuadée que ça peut être notre tour. Si on regarde par terre ou pire si on est au petit coin, pendant que la mariée lance le bouquet, on ne pourra jamais l’attraper.

J’ai confiance, ma belle, un homme à ta mesure traine quelque part. Si tu ouvres les yeux, son regard pourra rencontrer le tien.

"Je ne sais pas où va mon chemin, mais je marche mieux quand ma main serre la tienne." Alfred de Musset

8 octobre 2011

Philosophie

Je n’ai pas retenu grand chose de mes cours de philo au Cégep. Un truc sur Hobbes et Rousseau… Une histoire qui se passait dans une caverne… Une histoire entre la fille assise à coté de moi et le prof… Enfin, c’est pas mal ça ! À Part Wittgenstein. Et même lui, je n’ai retenu qu’une phrase. Mais quelle phrase !! Une phrase qui m’habite constamment et qui vient régulièrement alimenter mes pensées. . « Les limites de mon langages sont les limites de mon monde » Que c’est beau, que c’est vaste comme citation. Dans ces quelques mots joliment alignés, il y a un espace infini pour réfléchir.

Tout ça s’applique vraiment bien au monde des émotions. En nommant précisément ce qu’on ressent, il est possible de prendre conscience de toute la subtilité de ce qu’on peut vivre. En modifiant les mots qu’on utilise pour se raconter, on arrive à modifier la trajectoire de notre histoire, l’intensité des sentiments. La trame narrative a aussi beaucoup d’importance. L’ordre dans lequel on se révèle, la forme du fil sur lequel on pose les mots, changent profondément le sens du vécu.

Reste à savoir si l’inverse est aussi vrai. S’il est possible d’atténuer la douleur en cessant de nommer ce qui se passe. En se taisant. Est-ce que le silence peut effacer une blessure ? Si on ne met pas de mots sur la déchirure, si on se contente de quelques mots simples pour rationnaliser l’effondrement soudain du dernier espoir, est-ce que la souffrance est moins pénible, la guérison moins lente ?

4 octobre 2011

Résilience

Étonnant qu’avec le temps on arrive à se remettre d’une déception amoureuse avec la rapidité de l’éclair. Comme si on avait l’habitude. Doucement, on remet nos pieds dans les pantoufles du célibat, on reprend nos habitudes, ajoute une activité par-ci, un souper par là. On attend la crise, le désespoir, mais ça ne vient pas. On a pleuré un peu quand même, mais on est loin du déluge attendu. On n’a même pas appelé les ami(e)s qui se sont portés volontaires pour nous entendre se plaindre et radoter. La vie a repris son cours et comme elle est bien remplie c’est juste si on se souvient qu’on a gouté la complicité et la douceur. Il ne reste qu’un sentiment d’irréalité, à peine si on est convaincu que cette histoire a eu lieu.

On peut alors se demander si la résilience s’acquiert avec le temps. Si on peut développer la capacité à se détacher aussi rapidement. S’il est possible de se remettre d’une abrupte désillusion au point de respirer si calmement et si paisiblement ?

Mais c’est quand on prend le temps de s’arrêter et d’y penser qu’on réalise que sa présence hante nos nuits, qu’il se loge dans chaque rêve, répétant sans cesse qu’il est toujours là. C’est quand on se remémore comment on se sent durant le court moment entre le réveil et la douche, entre les rêves et la réalité, qu’on prend conscience que cette fois-ci notre cœur n’a pas éclaté en mille morceaux mais qu’il s’y trouve maintenant un trou énorme et que c’est par là qu’on arrive, temporairement du moins, à respirer.

25 septembre 2011

La muse

Qui n’a pas rêvé un jour d’être la muse de quelqu’un, d’inspirer l’autre dans sa création ou mieux dans la reconstruction de sa vie. Quel bonheur pour l’estime de soi que d’occuper cette place dans la vie d’un être qui habite notre cœur. Pourtant, lorsqu’on regarde la situation de plus près, la muse est loin d’occuper une place de choix, son rôle n’est pas du tout aussi enviable qu’on pourrait le penser à prime abord.

Si on prend le temps d’observer attentivement ce qui se passe, on se rend compte que souvent, la muse est prisonnière de ce rôle. Soumise à un destin incontournable ou empêtrée dans ses habitudes, il semble que la vie lui ait attribué une bien ingrate mission ; celle d’aider les hommes qui traversent sa route à guérir et à grandir. Noble mission pensez-vous ? Probablement. Mais tout aussi déchirante si on prend conscience que ces histoires sont toujours éphémères. Remis sur ses pieds, l’homme du moment est ensuite prêt à profiter de son nouveau lui, en paix, il est maintenant disponible pour une relation sérieuse… avec quelqu’un d’autre…

Dès lors, on peut aisément imaginer que la muse en ait un jour marre de jouer le rôle de passeur. Il ne reste qu’à voir s’il est sage et réaliste de résister et d’espérer être un jour l’inspiratrice quotidienne d’un homme courageux, capable d’assurer la réciprocité ou s’il ne lui reste qu’à se résigner et à tirer partie de ces rencontres blessantes mais à tout le moins enrichissantes.

30 juillet 2011

Faire ce qu'il faut (prise 2)

Tout le monde (ou presque) est (généralement) d’accord (même moi). Souvent, il faut faire ce qu’il faut.

Pourtant, vient un moment où loin de nous rendre heureux, léger, comblé etc . Faire ce qu’il faut fait démesurément mal. Ces gestes si simples, supposés ouvrir la voie vers le bonheur, sont autant de déchirures douloureuses. Couper le fil qui unit notre destinée à cet irremplaçable sorcier devrait (éventuellement) être libérateur. Pourtant, chaque seconde qui s’écoule, creuse un peu plus le cratère béant qui grandit dans notre cœur depuis qu’on a mis fin à cette histoire qui ne menait nulle part.

Ne pas pathétiquement LE rappeler pour se consoler, devrait nous soulager et créer du coup, l’espace nécessaire pour (enfin) vivre une relation saine et quotidienne. Pourtant, pas une journée ne passe sans que l’idée que c’est la seule personne qu’on laisserait approcher, ne traverse notre esprit troublé.

Apprivoiser la solitude, faire ce qui nous plait, profiter de ce temps qui n’appartient qu’à nous devrait nous permettre d’atteindre des sommets de bien-être solitaire. Ainsi que de remettre entre les mains du destin, l’espoir de partager un jour notre quotidien. Pourtant, plus on passe de temps seule, plus on plonge dans la solitude ; plus on questionne la pertinence de se relier aux autres et plus le vide nous aspire, nous retient dans son pathétique confort. Permettant au néant qui s'installe dans notre ventre, de poursuivre son expansion sans fin.

Pourquoi on le fait alors ? Parce qu’à douleur contre douleur, celle-ci a au moins le mérite de faire taire les ami(e)s cheerleaders et de rassurer les autres, qui croient tous et toutes profondément en nous, à notre capacité à (enfin) faire les bons choix et à être heureux.

5 juin 2011

Ben correct

Après une baise plus que satisfaisante (il y a certaines combinaisons d’êtres humains qui ne trompent jamais), elle lui susurre coquinement à l’oreille «…c’était comment ?...» « euh, ben, euh, ben correct » Lui répond-t-il maladroit comme à l’habitude, avec les mots qui confirment leur intimité incontestable. « ha ha ha, tu parles d’une mauvaise réponse » Ose-t-elle lui répondre, forte de leur complicité, jamais perdue, même après des années d’effort.

En y repensant (souvent) durant les jours qui suivent, « ce ben correct » résonne dans sa tête, tourbillonne, repart mais revient toujours. Il fait naître un léger soupir au creux de la poitrine, tout près du cœur. Comme un balbutiement de vulnérabilité. L’humanité dans toute sa simplicité… Un dimanche soir moche, vêtue de mou, tourmentée de choix à faire… Sa silencieuse mais ô combien réconfortante présence… Un film collé… L’absence d’attente de prouesses inusitées… Les corps qui, fidèles à leur habitude retrouvent leur chemin l’un vers l’autre… Ce corps qui n’a plus de secret tant il a été exploré… Son odeur réelle qui ne se cache plus sous un voile de parfum… Son ventre tendre criant d’humanité que n’éclipse plus les épaules surentrainées et tatouées… un calme et une sérénité inusitées après tant de tempêtes et de déchirement…

Elle se demande s’il s’agit de sagesse ou de l’expression de cette désillusion profonde qui s’est ancrée à force de voir ses rêves s’écrouler. Mais clairement, «ben correct », lui apparait maintenant comme un critère tout à fait raisonnable pour sa prochaine relation amoureuse. Mais elle a la triste conviction que ce ne sera pas avec LUI. Cet impulsif caractériel idéaliste ne pourra jamais croire qu’elle n’attend rien de plus de lui, que sa présence quotidienne, sans artifices et sans pression.

3 juin 2011

Les amies

Une amie à moi fête ses ??? ans. En tout cas, elle célèbre son anniversaire ce soir. Elle atteint l’âge où on commence à le cacher. Et pourtant, elle en fait au moins 10 de moins, physiquement, parce que son cœur n’a pas d’âge. Enfin. Elle a décrété que l’année qui venait serait celle du cœur et de l’amitié. Elle nous a aussi demandé de lui offrir un cadeau du cœur, un cadeau qui vient de nous. Ma belle, comme je sais que tu apprécies souvent mes billets, comme l’écriture fait profondément partie de moi, je te dédie celui-là. En fait, je l’écris spécialement pour toi…
Oui bien sûr, les amours, de toutes sortes, prennent beaucoup de place dans notre vie et dans notre cœur. J’y consacre d’ailleurs mon blog. C’est, par contre, plus difficile d’écrire sur l’amitié, l’amour c’est tellement plus déchirant et inspirant
!

Mais la vie ne serait pas complète sans les amies. Des amies meilleures précieuses et merveilleuses aux amies de passage en passant par celles qu’on ne côtoie qu’occasionnellement ou seulement lors d’activités spécifiques, toutes nous permettent à leur façon, de traverser la vie plus agréablement et souvent plus facilement.

On pense aisément aux fous rires partagés, aux moments de purs plaisirs où on a eu l’impression que le temps s’arrêtait. On ne pourrait pas oublier non plus, toutes les fois où les copines nous ont donné un coup de pouce, nous ont écouté radoter la même histoire pour la millième fois, ont séché nos larmes.

Certaines amitiés sont calmes, paisibles, d’autres plus explosives. Pourtant on a tendance à passer sous silence ces dernières et certains aspects plus difficiles, mais qui contribuent certainement à la force de ces amitiés. Des confrontations douces aux conflits ouverts, chaque amitié affronte son lot de défis. Ce sont ces mêmes défis qui solidifient avec le temps ces liens si précieux. On croise aussi, rarement, des amies qui, simplement en étant elles-mêmes, nous rendent inconfortables. Mais l’inspiration qu’elles suscitent surpasse l’inconfort qu’elles nous imposent sans le savoir. Ces étincelantes et déconcertantes amies, en nous déstabilisant, nous forcent à grandir, à nous assumer, à être nous même. Et ça c’est certainement le plus beau cadeau qu’une amie puisse nous faire.

21 mai 2011

Comment impressionner une fille ou l'art de détacher les soutien-gorges...

Ok les gars, on va se parler. On n'a rien contre le fait que vous vouliez nous impressionner. À vrai dire, on est assez d'accord. Même qu'on aime ça. Là où on ne se rejoint pas, c'est plus sur le moyen utilisé, sur le chemin emprunté. Parlant de moyen, détacher un soutien-gorge à une seule main c'est pas impressionnant ! Ça pourrait être cute, à la limite, si ça fonctionnait, si ça permettait de faire disparaître le plus discrètement possible tout ce qui empêche notre peau de se mouler à celle de l'autre. Or, il n'en est rien ! Dans la quasi-totalité des cas, au moment où on sent une main s'attarder sur une des dernières barrières à l'ultime intimité, l'homme sent le besoin d'annoncer ses prouesses à venir :"Regarde, je suis capable à une main". Ce qu'on constate surtout, ce sont les grimaces de plus en plus présentes sur son joli visage qui témoignent de son incapacité à relever le défi qu'il s'est lui-même (bien inutilement fixé). Le temps passe, un léger malaise s'installe, on finit par se charger nous même de cette tâche si simple quand on utilise nos deux mains et on tente tant bien que mal de reprendre le rythme.

Alors que ce qui est impressionnant, c'est un amant généreux, passionné et attentif avec lequel on arrive à s'abandonner et à s'ouvrir totalement et qui nous amène à des sommets de plaisirs inespérés tout en nous surprenant par sa capacité à maintenir une intensité doublée de douceur et de tendresse. Un amant avec qui la complicité est telle, qu'on peut se permettre de prendre autant de temps et de mains qu'on en a besoin pour se déshabiller et rire de notre maladresse sans perdre un seul instant la connexion ni diminuer le niveau d'excitation.

14 mai 2011

Faire ce qu’il faut

Tout comme les parents d’un nouveau-né se lèvent plusieurs nuits avant de sentir que ce geste fait du sens, tout comme un nouveau sportif doit s’entrainer plusieurs fois avant de sentir l’irrésistible attraction des endorphines, les nouveaux amoureux doivent aussi parfois se contraindre à faire ce qu’il faut s’ils veulent se donner une véritable chance.

Quiconque a vécu l’expérience avec un nouveau-né saisit bien ce phénomène : une fois l’excitation des premiers jours (nuits) passées, pendant plusieurs jours-semaines-mois (c’est selon) on prend soin du nouvel arrivant par obligation. On se lève la nuit, change les couches, allaite, parce qu’il le faut. Convaincu de la valeur de ce qui est en train de nous arriver, on s’oblige à poser les gestes qui s’imposent. Puis, lentement, sans trop s’en rendre compte, ces obligations s’intègrent à la routine et nous transforment. Subtilement, insidieusement, à travers l’intensité du moment, la grande fatigue et les instants de découragement se construit un lien plus fort que tout. Cet amour qui nait et se solidifie jour après jour fini par atténuer significativement le degré de difficulté de ces nouvelles tâches. Ces nouveaux gestes si pénibles au début deviennent l’expression de notre amour et le véhicule de la création de ce lien si profond.

Lorsque qu’on fait une rencontre intéressante, lorsqu’on sent qu’un avenir pourrait exister, il arrive un moment où on doit faire ce qu’il faut, où on doit se faire un peu violence afin de créer de nouvelles habitudes. Se donner un temps déterminé avant de jeter la serviette, rappeler même si on n’en ressent pas nécessairement le besoin, réserver des moments à deux même si on aurait préféré rester tranquille à la maison, s’ouvrir, parler, écouter même si c’est parfois épeurant, etc. Tout cela ne se fait pas sans douleur, créer de nouvelles routines et faire de la place impliquent des deuils, des pertes. Si on persiste à ne faire que ce qui nous fait totalement envie, on finit par passer à côté de relations substantielles et significatives. On se résigne ainsi à collectionner les éphémères fleurs de printemps, alors qu’avec de la patience et un peu de bonne volonté on aurait pu se lancer dans la culture d’orchidée.

"Sans imagination, l'amour n'a aucune chance" Romain Gary